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Elle reprit le fil de sa lecture. Elle faisait de son mieux pour
s’accrocher à son scepticisme et tenter de traiter le texte comme
une farce ou un simple jeu, mais un paragraphe suffit à semer
le doute dans sa tête :
Les sorciers raffolent des mots. La plupart d’entre eux sont
d’avides lecteurs – on reconnaît d’ailleurs souvent les éventuels
candidats à leur incapacité à trouver le sommeil sans avoir
d’abord lu au moins quelques pages. C’est d’ailleurs leur
amour et leur talent pour la langue qui font précisément d’eux
une force qu’ il serait dangereux de sous-estimer. Quelle est
l’essence même de la sorcellerie ? La capacité à convaincre une
parcelle de ce monde – un arbre ou une pierre, par exemple –
qu’elle n’est pas ce qu’elle croit être, qu’elle est bien autre chose.
Les mots choisis avec adresse, la force de conviction sont le
matériau de base du magicien. Ainsi armé, il pourra briser
un raz-de-marée, persuader un arbre de cesser de croître (ou
au contraire de pousser plus vite), figer le feu, embraser
la pluie – et même, qui sait, ralentir l’agonie de l’Univers.
Ce qui, bien entendu, n’est autre que la véritable raison
d’ être des sorciers. Voir le chapitre suivant.
Nita leva le nez de son livre et contempla sans le voir un
poster de Bugs Bunny placardé entre deux étagères.
C’était vrai : l’univers courait à sa perte, toute son énergie
progressivement épuisée. Elle l’avait appris au club d’astronomie.
On appelait ça… l’entropie. Mais c’était bien la première fois
qu’elle entendait parler de la possibilité de ralentir ce phénomène.
Elle secoua la tête, incrédule, puis passa à la section « corré
lations », où étaient énumérées toutes les caractéristiques d’un