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Sans lui laisser le temps de se poser d’autres questions, il
s’écarta de la vitrine à laquelle il était adossé et parcourut à
grands pas la distance qui les séparait.
Une fois planté devant elle, il lui adressa un sourire qui
n’aurait pas déparé sur une star de cinéma, et Sophie sentit son
cœur s’emballer légèrement. Il désigna la photo en première page
du journal.
—
C’est bien toi, non ? demanda-t-il.
Sophie acquiesça, incapable d’ouvrir la bouche. Il devait avoir
quinze ans, et c’était de loin le garçon le plus mignon qu’elle ait
jamais vu. Que lui voulait-il ?
—
Je me disais, aussi…marmonna-t-il.
Il examina son portrait, les paupières plissées, puis se tourna
de nouveau vers elle.
—
Je nem’étais pas rendu compte que tu avais les yeuxmarron.
—
Eh bien… si, dit-elle, prise au dépourvu. Pourquoi ?
Il haussa les épaules.
—
Pour rien.
Quelque chose clochait dans cette conversation, qui la laissa
déroutée et perplexe. Elle ne parvenait pas à identifier l’accent
de l’inconnu. Britannique, peut-être… enfin pas tout à fait.
Elle n’en avait jamais entendu de pareil, ce qui la perturbait
étrangement.
—
On est dans la même classe ? demanda-t-elle.
Et s’en mordit aussitôt la langue. À croire qu’elle avait le
cerveau ramolli ! Comment aurait-il pu faire partie du groupe ?
Elle ne l’avait jamais vu ! Parler aux garçons, surtout mignons,
n’était décidément pas son fort…
Il lui répondit par la négative, un nouveau sourire sur ses
lèvres parfaites, avant de désigner l’immense silhouette verdâtre
qui les dominait. Un
Albertosaurus
,
dans toute sa splendeur de
lézard géant.