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Son père hocha le menton d’un air triste.
—
Oui, mais quand ? J’en ai marre de te voir souffrir, Nita.
Il la dévisagea un instant avant de reprendre d’un ton
hésitant :
—
Ma chérie… Tu ne pourrais pas, comment dire, juste
faire semblant de leur ressembler un peu plus…(Il s’interrompit,
une main dans ses cheveux argent.) Mais qu’est-ce que je
raconte ? murmura-t-il. Écoute, il faut que ça s’arrête, d’une
manière ou d’une autre. Je vais te laisser dormir. Dès que tu iras
mieux, on décidera d’un plan d’action, d’accord ? En attendant,
s’il y a quoi que ce soit que je puisse faire, fais-moi signe.
—
D’accord.
—
Bon, et pour demain…Tu penses que tu seras d’attaque
pour ratisser un peu le jardin ? J’aimerais aérer la pelouse autour
du sorbier, peut-être même faire quelques semis.
—
Pas de problème.
—
Parfait. Je te laisse finir ton assiette, repose-toi bien !
Il se leva et quitta la pièce sans fermer la porte, comme toujours.
Nita termina son repas sans se presser, car sa mâchoire la
faisait souffrir. Elle ne parvenait pas à chasser de ses pensées
Joanne et l’ouvrage posé à ses côtés.
Voyons voir… La Lune est
à son premier quartier aujourd’ hui. C’est une bonne nuit pour
l’observer au télescope : les ombres des cratères seront bien visibles.
Sans oublier la nouvelle comète ! Sa queue sera peut-être un peu
plus longue que la semaine dernière…
Mais rien n’y faisait. Installé là, sur le lit, le guide semblait la
dévisager, la défier d’oser quelque chose de gamin, de stupide,
de complètement ridicule.
Nita repoussa son assiette vide, attrapa le livre et lui rendit
son regard.