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— Eh bien… Tu as peut-être oublié qui tu étais, mais appa
remment tu as été élevé dans la bonne société, marmonna la jeune
fille, dont les soupçons quant à la véritable identité de son protégé
ne faisaient qu’empirer. Si tu comptes rester dans les parages un
moment, tu constateras que les demoiselles, ici, ne sont pas du
genre à s’embarrasser des conventions.
Il se contenta de tourner la tête vers elle, perplexe : il attendait
une explication. Pour toute réponse, Charlotte poussa un rire
acerbe. Elle aurait sans doute dû faire preuve d’un peu plus de
compassion, mais lui révéler l’emplacement de leur cachette était
déjà bien assez risqué.
Et puis les inventions de Birch s’avéraient systématiquement trop
complexes à son goût. Elle mettait toujours un temps fou à localiser
le satané loquet aménagé dans une fausse racine… alors que tout
retard pouvait leur coûter la vie ! Rien n’indiquait que sa souris ait
vraiment suffi à arrêter les Pots de rouille. Or, même ralenti par une
explosion, un Cueilleur demeurait une menace mortelle.
—M…Mais…
À ses côtés, le garçon bredouillait, désorienté, hésitant à lui
présenter des excuses. Il se tut aussitôt qu’elle lui souffla, d’une
voix douce, de se tenir tranquille. Enfin, les doigts de la jeune fille
effleurèrent une racine à l’écorce plus dure et plus froide que les
autres.
— La voilà !
—Quoi donc ? s’inquiéta-t-il en remuant vainement la tête,
toujours aveuglé.
— Silence, te dis-je ! gronda Charlotte, contrainte de réprimer
un fou rire devant le manège de son captif pourtant impuissant
– une réaction bien cruelle d’ailleurs, se morigéna-t-elle.
Elle finit par trouver le loquet sur la face inférieure de
l’épaisse racine : un compartiment s’ouvrit dans la petite section
de bois artificiel. Elle tourna rapidement la minuscule manivelle
cachée à l’intérieur, et retint son souffle jusqu’à ce que fuse la